C’est une longue histoire d’amitié et de passion, et l’une des plus belles pages de l’histoire du rallye français qui viennent de s’achever brutalement, ce mercredi 31 juillet : Jean-Luc Thérier nous a quittés, emporté par la maladie, à l’âge de 73 ans. Son état de santé s’était dégradé ces dernières années mais il se battait comme il l’avait toujours fait, lui qui eut à affronter de terribles moments après l’accident du Paris-Dakar 1985 qui mit un terme à sa carrière.
Pour beaucoup, à commencer par ses amis « Mousquetaires » de l’équipe Alpine championne du monde des rallyes en 1973, il était le plus doué, celui qui était capable de partir sur un rallye sans avoir reconnu, en empruntant les notes de son ami Jean-Pierre Nicolas, et de se battre aux avant-postes. A l’aise sur tous les terrains, son talent naturel lui permettait d’inquiéter les pilotes nordiques sur la terre ou sur la glace, ce qu’il fit notamment au rallye de Suède 1973 avec une Berlinette prêtée au dernier moment par Jacques Cheinisse, le directeur sportif d’Alpine, un joli cadeau pour célébrer le mariage du Normand.
Débutant par le karting en 1960, Jean-Luc Thérier se mit en valeur à partir de 1966 au volant de la R8 Gordini , une voiture faite pour lui, dans la Coupe en circuits comme dans les rallyes de l’Ouest de la France. Enrôlé dans l’équipe Alpine, il fut de toutes les grandes batailles, décrochant ses premiers lauriers internationaux en 1970 (1er au Rallye d’Italie et à l’Acropole) et raflant le titre de champion de France des rallyes en 1972. L’aventure en bleu l’amena également aux 24 Heures du Mans, où il s’adjugea la première place de l’Indice énergétique, en 1969, en compagnie de Bernard Tramont, sur Alpine A210.
Vainqueur du Marathon de la Route 1971 (96 heures sur le grand circuit du Nürburgring !) avec ses amis Jacques Henry et Maurice Nusbaumer, il fut également le premier à remporter un rallye avec un moteur Renault turbo, domptant l’Alpine A110 ainsi vitaminée sur les routes du Critérium des Cévennes 1972. Et s’il y avait eu titre de champion du monde des Pilotes en 1973, année du sacre d’Alpine, c’est lui qui aurait eu la couronne… A son tableau de chasse, cette année-là : des victoires au Portugal, à l’Acropole et au San Remo !
La carrière de Jean-Luc Thérier ne sera faite que de coups d’éclats. Quoi de plus normal pour ce pilote instinctif qui ne savait pas jouer les « épiciers » ? Les Renault succédant aux Alpine, il s’impose au Rallye Press On Regardless, sur les routes forestières nord-américaines, au volant de la R17 Gordini, en 1974. Puis une nouvelle page s’ouvre, également couronnée de succès, avec la période Toyota, à partir de 1976. C’est l’époque des fantastiques envolées sur la terre, le Normand devenant roi du Rallye des 1000 Pistes, qu’il remporte trois fois d’affilée avec la Celica, entre 1977 et 1980 (vainqueur de la Coupe de France des Rallyes sur Terre en 1979).
En 1980, c’est le sacre au Tour de Corse, l’une de ses plus belles victoires, au volant d’une Porsche 911 SC Groupe 4 préparée par les frères Alméras. Le retour aux Renault, cette fois avec la 5 Turbo de Renault Chartres, le voit de nouveau s’imposer aux 1000 Pistes et décrocher un autre titre de champion de France en 1982. Les victoires s’enchaînent au rallye d’Antibes ou au Jeanne d’Arc, en 1983 et 1984, année où il signe une nouvelle performance de premier ordre, avec une 4e place au Monte-Carlo, 1er des 2 roues motrices. Cette saison, hélas, sera la dernière…
Ces aventures, il les avait confiées à Echappement Classic, avec la truculence et l’humour qui le caractérisaient, dans une série de chroniques, publiées dans le magazine entre 2011 et 2013, puis reprises et enrichies dans un numéro hors-série paru en janvier 2014.
Nous nous souvenons encore de la visite à son domicile, près de Neufchatel-en-Bray, son fief normand, et de la joie qui illuminait son regard au récit de ces années magnifiques. A ses côtés, Jacqueline, son épouse, et Nicolas, leur fils, gardien du temple de la légende paternelle en charge de l’écriture des chroniques, partageaient son bonheur.
Nous nous souvenons encore de la visite à son domicile, près de Neufchatel-en-Bray, son fief normand, et de la joie qui illuminait son regard au récit de ces années magnifiques. A ses côtés, Jacqueline, son épouse, et Nicolas, leur fils, gardien du temple de la légende paternelle en charge de l’écriture des chroniques, partageaient son bonheur.
Jean-Luc Thérier était un personnage d’une rare authenticité, passionné de rallyes jusqu’au plus profond de son être, chaleureux et convivial. Il va nous manquer terriblement.
(William Pac)
(William Pac)