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    vendredi 6 mars 2015

    Endurance ; Histoire de livrées et de couleurs, part 2…

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    par Guillaume Robert (Endurance-Info.com)
     
    Reprenons le fil de notre sujet, et entrons un peu plus dans le détail pour ne pas tout mélanger, car d’un point de vue décoration il y a les livrées, les Art Car et ce que l’on pourrait appeler les autos plus typées marketing.
    Commençons par les Art Car, qui elles, se font rares mais c’est aussi le principe de ces réalisations et ce qui en fait leur charme, même si comme beaucoup, nous aimerions en voir plus souvent en piste. La décoration de ces autos, véritables œuvres roulantes, est généralement réalisée en collaboration avec un artiste renommé dans le monde de l’Art. Souvent finalisée pour un one shot, et sur une course importante de la saison où l’impact médiatique, pour l’artiste et l’équipe, sera bien plus important au niveau des retombées. Bien que cela soit assez rare, il arrive parfois que l’auto conserve cette robe unique pour une ou deux autres manches du championnat, ou sur l’ensemble de la fin de saison. Les partenaires sont souvent peu visibles sur ce type de réalisation, où alors discrètement intégrés au design final.
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    Les livrées, elles, ont pour but de mettre en valeur l’auto, de valoriser les sponsors de l’équipe et de différencier le concurrent une fois en piste face à ses rivaux. Etudiée par le team avant l’entame de la saison, cette livrée sera conservée sur l’ensemble des manches tout au long de l’année. Réussies, ou non, elles peuvent être plus ou moins discrètes afin de valoriser les sponsors principaux de chacun des pilotes qui se partagent le volant de l’auto.
    Il y a justement là un point important concernant le résultat final de cette livrée, car il est évident que chacun de ces partenaires financiers souhaite disposer du meilleur emplacement visible sur la voiture afin de rentabiliser au mieux son investissement.
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    Il est donc monnaie courante que des designers soient obligés de revoir leur copie une fois, puis deux, puis trois, et encore, et encore, pour tenter de satisfaire tout le monde et finalement arriver à un résultat qui ne ressemble plus du tout aux esquisses de départ.
    Il est évident que si ces créateurs avaient plus aisément carte blanche sur le fait d’intégrer eux mêmes chacun de ces partenaires financiers à la livrée, nul doute que le résultat final aurait souvent plus d’allure, et forcément, un bien meilleur impact sur le public… Et qui dit meilleur impact, dit meilleures retombées ! N’est-ce pas là l’intérêt d’un investissement pour un partenaire ?
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    Pour les dernières, les autos marketing, elles sont heureusement plutôt rares, mais assez facile à reconnaître. Habillées d’une robe “unicolore”, agrémentées de simples stickers (ou pas du tout) mentionnant les sponsors et rien de plus. Pas de seconde couleur, pas de liserés garnissant un peu l’ensemble, etc.
    Dans certains cas cette démarche peux s’expliquer par un budget global restreint au sein de l’équipe, pour les autres, simplement un manque d’intérêt pour ce sujet… Ce sont majoritairement ces autos qui sont montrées du doigt lorsque l’on est en bord de piste dans les zones spectateurs. Sans réel intérêt pour les photographes amateurs, ou avertis, qui ne voient souvent aucune raison de photographier plus d’une ou deux fois cette auto.
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    On peux donc aisément se poser la question de savoir si l’investissement fait par les partenaires présents sur ces voitures sont rentables ? A moins que les pilotes soient eux mêmes les sponsors, et dans ce cas…
    Pourtant, une livrée réussie ou une Art Car marquent les esprits ! Si je vous dis : BMW Calder, BMW M1 Andy Warhol, Aston Martin Vantage JMW/Dunlop, BMW M3 Jeff Koons ou bien encore Morgan OAK Racing LMP2 Fernando Costa, nul doute que ceux qui ont vu au moins une fois ces prototypes ou GT, que ce soit en photo ou en piste, auront immédiatement le visuel de ces “œuvres” au fond des yeux. Prenons un exemple assez récent, que beaucoup d’entre vous visualiserons sans trop de difficultés.
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    Retrouvons nous lors de l’édition Mancelle de 2011, où dès le pesage, deux autos vont faire sensation une fois ôté les housses protégeant les “belles” des regards indiscrets. Ce sont les Porsche 997 GT2 du Flying Lizard Motorsport, qui avec leurs livrées imaginées par “Troy Lee Design”, mélangeant avec succès graphisme et panel de couleurs vives, tombent immédiatement sous les assauts des nombreux photographes, professionnels ou amateurs, qui ne cesseront de mitrailler les Porsche américaines, et cela jusqu’à leurs derniers tours de roues en Sarthe. Pourtant, même si la plupart d’entre vous réussiraient à me décrire ces deux allemandes jusque dans les moindres détails, je suis également convaincu que peu pourraient me donner les résultat sportif des “jumelles” au baisser du drapeau à damier au terme des 24 heures.
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    Mais n’est-ce pas là l’intérêt premier que de réaliser une livrée percutante, qu’elle soit Art Car ou non ? Si en plus l’auteur parvient à mêler dans cette décoration le logo ou l’identité graphique du partenaire principal de l’équipe, le pari n’est-il pas immédiatement gagné pour ce sponsor qui verra son investissement en parti amorti lors de la diffusion des premières photos de l’auto ! Il arrive même que certaines équipes fassent dans l’asymétrique, provoquant ainsi une chasse aux clichés encore plus intense où tout photographe voudra posséder chacun des angles de l’auto afin de rien manquer de cette création.
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    Il semble qu’en Europe, cette notion de livrée n’ait pas la même résonance pour les équipes, et cela quel que soit le championnat, national, international ou mondial. Certaines structures n’hésitent pourtant pas à franchir le cap, sans pour autant aller jusque dans la réalisation d’une oeuvre roulante, mais simplement en mettant réellement en valeur l’auto et ses divers sponsors avec de la couleur mais surtout un réel travail graphique et harmonieusement finalisé…
    Si l’on jette un rapide coup d’œil hors de l’Europe, que ce soit aux Etats Unis, en Asie et même en Australie, dans la majorité des championnats respectifs, Pirelli World Challenge, NASCAR, SUPER GT, GT Asia Series, GT Australien ou encore V8 Supercars, on peux sans peine se rendre compte que la visibilité d’une auto compte pour les équipes. Les sponsors sont nettement mis en valeur, graphiquement et en couleur, et cela quel que soit le support : berline, GT, ou prototype. Alors, certes, on aime ou on aime pas ce qui est fait sur une auto, mais la démarche est tout de même là.
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    “L’Europe doit ouvrir les yeux et s’en inspirer !” nous dit David Usal. “Que ce soit en Australie, aux US ou au Japon, les décorations sont primordiales pour les équipes, ce que l’on ne voit pas toujours en Europe. Quel dommage car les courses sont agréables à regarder avant même d’avoir commencé. Pour tout graphiste je pense que ce doit être un réel plaisir que de pouvoir créer une livrée pour un ou plusieurs concurrents de ces championnats..”
    2e_article_livrées_endurance-info (8)Matthieu David confirme ce ressenti : “Aux USA, avec la série NASCAR ou encore le V8 Supercars Australien, nous avons des livrées splendides ! Sans compter que quelques teams changent ces décorations à l’occasion de certains meetings pour des occasions bien particulières (opérations marketing, sponsoring spécifique à une manche, anniversaire, etc.), que ce soit au USA (avec la Chevrolet #24 de Jeff Gordon par exemple) ou en Australie.”
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    Profitons de l’occasion pour rencontrer Stéphane Brun, plus connu dans le milieu sous le nom de GaazMaster Motorsport, et posons lui quelques questions sur le sujet. Stéphane, designer de talent, a notamment officié pour le TDS Racing ces dernières saisons en œuvrant par exemple sur la Z4 GT3 de l’équipe. Vous avez d’ailleurs pu voir le résultat de son travail depuis quelques jours avec la révélation des livrées 2015 des équipes KCMG et Thiriet by TDS Racing, toutes deux sur la base de la ORECA 05, toute nouvelle auto de la catégorie LMP2.
    Stéphane, comment est né GaazMaster Motorsport ?
    Stéphane : “J’ai toujours été passionné de dessin et de belles mécaniques et lorsque je me suis fracturé la main il y a maintenant huit ans, comme les journées étaient longues lors de ma convalescence il fallait que je m’occupe, c’est à ce moment là que j’ai découvert la 3D sur informatique. Par la suite, pendant plus de trois ans, je travaillais la journée et la nuit j’apprenais ces nouveaux outils. Depuis quatre ans j’ai tout lâché, monté ma structure, “GaazMaster” et tout s’est enchaîné. J’ai découvert toutes ces nouvelles possibilités que l’on pouvait mettre en place grâce, et avec les teams et constructeurs . C’est presque infini, et plus que motivant !
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    Le cahier des charges est-il complexe à chaque nouveau projet validé ?
    “Oui et non … Parfois même, il n’y en a pas. Mais il est un mal nécessaire, et plus j’ai d’éléments à ma disposition, plus le travail de création en sera facilité. Le cahier des charges permet, au delà de la gamme de couleur à utiliser, de planifier l’ensemble du zoning de la voiture, l’emplacement des sponsors, des partenaires, des éléments officiels, etc …Il peut aussi être beaucoup plus suggestif, comme par exemple : quelque chose de très différent par rapport à l’année dernière, ou de très dynamique, tout en rondeur … Cela fait un peu cliché mais ce sont des éléments très important pour bien connaitre l’esprit de l’équipe, et la direction à tenir. C’est ensuite que mon travail intervient, intégrant tout ces éléments, mais aussi en respectant le design même de la voiture afin qu’elle soit le plus possible mise en valeur. C’est bien la toute la difficulté … Notre travail est de la rendre plus belle qu’elle ne l’est déjà, sans trahir le design original.”
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    As-tu facilement carte blanche pour ton travail ?
    “C’est très rare ! Mes clients me font confiance sur le design, mais il est très rare de pouvoir se lâcher pleinement. Bien souvent l’écurie dispose déjà de couleurs établies sur lesquelles peuvent parfois venir se greffer celle d’un sponsor. Pour le design c’est justement mon rôle de faire des propositions, parfois différentes de ce qu’ils avaient imaginé, afin de trouver la bonne alchimie.”
    Y a t-il des contraintes qui reviennent régulièrement ?
    “Les contraintes sont principalement liées aux sponsors (formes des logos, couleurs, tailles et emplacements). Il faut parfois intégrer une multitudes d’éléments et faire en sorte que cela reste cohérent et en harmonie avec la livrée, que le tout soit homogène. Il peux parfois y avoir des contraintes de coût, car il n’est pas toujours facile pour une écurie d’envisager du full covering sur l’ensemble d’une saison. Les éléments officiels sont un facteur à ne pas négliger non plus (numéros, sponsors du championnat, plaques “rallye”, etc ), car ils prennent parfois un emplacement conséquent, et viennent réduire d’autant l’espace lié à la livrée. J’ai de nombreuses fois effectué des adaptations de dernières minutes, car les emplacements officiels avaient changés. Il y a ensuite des contraintes techniques qui sont vraiment liées au véhicule en lui-même.”
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    Quelques unes de tes dernières créations les plus connues sur les deux ou trois dernières années ?
    “Il n’y en a pas tant que ça… Mon activité est encore relativement récente , mais certaines ont bien marqué les esprits comme la BMW Z4 GT3 du TDS Racing. Il y a aussi eu des exercices un peu compliqués comme adapter une livrée sur différents véhicules (ORECA 03, Audi R8 et Porsche Cup) pour le SLR (Sébastien Loeb Racing), dont je suis assez fier. De nombreuses Oreca, la Ford Fiesta de Julien MAURIN pour le Monte Carlo, ou encore la Citroën C-Elysée, toujours pour le SLR en WTCC. Dans un autre registre, la moto, la Honda CBR Superbike qui a reçu un bel accueil. De nombreuses réalisations sont aussi restées dans les cartons. Depuis quelques jours, mes nouvelles créations font parler d’elles, mais vous n’avez pas encore tout vu concernant 2015 ! Patience … (sourire..)
    Ton avis sur ce qui se fait sur les autres continents, Australie, USA ou Asie ?
    “Pour moi, tout est différent sur chacun de ces continents. Les Etats unis ont par exemple une véritable culture du sport mécanique, les voitures sont aujourd’hui de véritables outils marketing qui font la part belle aux marques. J’ai un amour particulier pour ce qui se fait en Asie, en SUPER GT. C’est chic, sobre et efficace. Une GT-R Pennzoil ou Motul c’est quand même classe, non ? Ce sont surtout des voitures qui laissent leur empreinte dans le temps et ça c’est très important.
    Pour conclure, je suis parfois nostalgique des livrées vintages, comme Porsche et Martini, pour ne citer qu’elles parmi tant d’autres ! Peut-être parce qu’elles ont marqué leur histoire et qu’elles sont aujourd’hui devenues intemporelles… Et si justement, pour être efficace, il fallait rester simple ? ou pas… (sourire)”
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